Comme toutes activités commerciales, les activités numériques peuvent faire l’objet d’une cession. On parlera selon le cas de cession d’actifs numériques ou de cession de fonds de commerce électronique.
Dans le présent guide nous aborderons les principaux points qui distinguent la cession du fonds de commerce électronique du fonds de commerce traditionnel et donnerons le point de vue du praticien sur la première.
Qu’est-ce qu’un fonds de commerce électronique ?
En droit, le fonds de commerce désigne l’ensemble des éléments matériels et immatériels nécessaires à l’exploitation d’une activité économique. Il comprend notamment la clientèle, les locaux commerciaux, les équipements nécessaires au fonctionnement de l’entreprise, les contrats de prestation, le stock de marchandises, les actifs immatériels (marques, brevets…). Autrement dit, le fonds de commerce désigne un ensemble d’outils nécessaires à l’exploitation d’une activité donnée.
Le fonds de commerce électronique est le pendant du fonds de commerce s’agissant d’une activité numérique. Il comporte donc les éléments précités, auxquels s’ajoutent d’autres éléments plus spécifiques.
Quels éléments sont importants à auditer dans le cadre de la cession d’un fonds de commerce électronique ?
Dans le cadre de la cession d’un fonds de commerce électronique, les parties et leurs conseils devront réaliser un audit (également appelé due diligence) de la situation juridique et comptable du fonds de commerce. Cet audit portera naturellement sur un certain nombre d’éléments communs à toutes cessions de fonds : documents comptables, contrats de travail, principaux contrats de prestation, état des stocks, actifs de propriété intellectuelle...
S’agissant des éléments spécifiques au fonds de commerce électronique, nous préconisons de faire porter l’audit plus spécifiquement sur les éléments suivants :
- noms de domaine exploités pour l’activité ;
- site internet, mots de passes, identifiants d’accès des outils d’édition et de paramétrage du site internet ;
- contrats informatiques associés : développement, hébergement, maintenance, référencement, affiliation, etc. ;
- e-réputation (avis Google, Trust Pilot…) ;
- documentation contractuelle utilisée par le site internet (CGU, CGV, politique de confidentialité, etc.) ;
- fichier clients, logiciel de gestion des clients ;
- comptes détenus sur les différents réseaux sociaux et liés à l’exploitation du site internet.
Quelles questions pouvez-vous poser dans le cadre de la cession de fonds de commerce électronique ?
La liste n'est évidemment pas exhaustive et ne dispense pas de l'ensemble des questions que devront se poser les rédacteurs par rapport à des éléments plus classiques.
Est-ce que le vendeur du fonds détient bien le ou les nom(s) de domaine ? Auprès de quel bureau d’enregistrement ont-ils été enregistrés et comment les renouveler à échéance ?
Les contrats informatiques sont-ils cessibles ? S’ils ne le sont pas, le cocontractant consentira-t-il à la poursuite de l’activité ?
Est-ce que le vendeur détient bien tous les droits de propriété intellectuelle sur le site Internet cédé ?
Est-ce que la e-réputation est bonne et est-ce que les avis clients ont été collectés de manière loyale et transparente ?
Les documents contractuels sont-ils conformes à la réglementation générale et spécifique à l’activité ?
Le fichier client a-t-il été constitué de façon licite et est-il conforme à la règlementation sur les données personnelles pour les collectes et traitement envisagés ?
Que deviennent les salariés travaillant sur le fonds de commerce électronique, en cas de cession ?
Les salariés rattachés au fonds de commerce suivent le sort du fonds, conformément à l’article L. 1224-1 du Code du travail. Cet article, qui est d’ordre public, s’applique également en cas de cession de fonds de commerce électronique. Il ne fait donc aucun doute qu’un salarié travaillant pour une activité e-commerce (développeur, community manager, logisticien…) suivra le sort du fonds en cas de cession et verra son contrat repris de plein droit par l’acquéreur du fonds. Cela implique donc nécessairement d’auditer les contrats de travail afin de déterminer les salaires et avantages des salariés.
Comment céder un fonds de commerce électronique ?
Sur le plan contractuel, comme pour le fonds de commerce traditionnel, la cession interviendra généralement selon deux actes successifs.
Le premier acte consiste en un compromis, ou une promesse, assorti de classiques clauses suspensives (obtention d’un financement, par exemple). Si la promesse est unilatérale, elle doit, sous peine de nullité, être enregistrée au service des impôts. Le second acte interviendra après levée des conditions suspensives afin d’opérer la cession du fonds de commerce électronique à proprement parler.
Si les parties à l’acte estiment pouvoir se passer de conditions suspensives, il est néanmoins tout à fait possible de céder en un seul acte.
Une entreprise peut-elle céder un site e-commerce et conserver ses activités physiques (ou inversement) ?
Rien ne fait obstacle à ce que l’entreprise ne cède que ses activités physiques ou seulement ses activités en ligne. Un soin particulier devra alors être porté au périmètre de la cession, tout en s’assurant qu’un élément quelconque de l’activité qui n’aura pas été cédée ne vienne pas entraver l’exercice de l’activité cédée.
Une clause de non-concurrence est-elle nécessaire ?
Fréquente dans les cessions de fonds de commerce traditionnel, elle nous semble d’autant plus importante pour les fonds de commerce électronique, considérant l’absence de lien entre la localisation géographique de l’activité et la clientèle. Aussi, l’acquéreur voudra-t-il se prémunir contre le risque que le vendeur créé une nouvelle activité électronique concurrente à celle qu’il a cédée, en stipulant une clause de non-concurrence.
Quelles formalités doivent être réalisées ?
Les formalités administratives à réaliser lors de la cession d’un fonds de commerce électronique sont identiques à celles réalisées pour la cession de fonds de commerce traditionnel.
Une fois l’acte opérant cession régularisé par les parties, les contractants ont quinze jours pour notifier la cession par le biais d’une publication au BODACC.
L’acheteur doit en outre faire enregistrer la vente auprès du bureau d’enregistrement du service des impôts du lieu de situation du vendeur.
L’acquéreur supporte des droits de mutation qui s’élèvent à la valeur de vente du fonds de commerce selon le barème suivant :
- 0 % jusqu’à 23.000 euros,
- 3 % entre 23.000 euros et 107.000,00 euros
- 3 % entre 107. 000 euros et 200.000,00 euros,
- 5 % au-delà de 200.000,00 euros.
Enfin, il faudra bien prévoir le transfert effectif des identifiants permettant la gestion du site Internet, ceux permettant la gestion du nom de domaine, les éventuels codes de dépôt d’un logiciel (à l’APP par exemple), etc.
Pourquoi avoir recours à un avocat pour la cession de votre fonds de commerce électronique ?
S’il n’est pas obligatoire d’être accompagné d’un avocat pour céder un fonds de commerce électronique, cela est néanmoins fortement recommandé.
Un avocat compétent dans la matière sera en mesure de vous assister tout au long de l’audit et dans la rédaction des contrats de cession afin de s’assurer du respect des conditions et formalités pour garantir le meilleur déroulement possible de la vente.
Par ailleurs, il pourra réaliser les formalités légales consécutives à la vente du fonds de commerce électronique et exercer le séquestre du prix de vente le temps que soient purgées les oppositions ainsi que le délai de solidarité fiscale.
N’hésitez pas à nous solliciter pour vous accompagner dans ces démarches.